5.3 Aperçu économique du cycle de vie de la centrale nucléaire (CN)
Les CNP sont conçues et exploitées pour produire de manière sûre et fiable de l’énergie électrique en réalisant un bénéfice. Elles sont particulièrement adaptées à la tâche consistant à fournir une puissance de base constante au réseau. Ceci est particulièrement pertinent si l’énergie nucléaire ne représente qu’une partie (par exemple jusqu’à environ 20-30%) de la combinaison de production d’énergie globale d’un pays, et que d’autres sources d’énergie sont disponibles et peuvent être facilement ajustées pour suivre les pics et les creux de la demande. Dans certains pays où la majorité de l’énergie électrique (environ 75 %) est d’origine nucléaire, comme en France, la production des centrales nucléaires doit être ajustée en fonction de la demande car les possibilités de flexibilité sont moindres. A titre de comparaison, le Royaume-Uni (avec environ 19% d’énergie produite par le nucléaire), n’a jamais conçu, autorisé ou exploité la première et la deuxième génération de centrales nucléaires pour fonctionner pour suivre les demandes variables d’énergie, et donc leur rôle continue à être de fournir la charge de base au réseau .
Plus longtemps une centrale nucléaire fonctionne à sa pleine puissance nominale autorisée, sans arrêts forcés ou restrictions opérationnelles liées à la sécurité, plus elle crée de l’argent. Les centrales nucléaires sont coûteuses à construire, mais relativement bon marché à exploiter ; ce n’est généralement que dans les dernières années de leur vie de conception initiale qu’elles approchent de l’amortissement. Par conséquent, il est judicieux, d’un point de vue commercial, d’atteindre d’abord la durée de vie nominale de la centrale et, tout en respectant la capacité de la centrale concernée à remplir ses conditions d’autorisation (aspects liés à la sécurité), de poursuivre son exploitation. La « durée de vie nominale » d’une centrale nucléaire peut être considérée comme un terme relatif, puisqu’elle est largement basée sur des évaluations techniques généralement très conservatrices des SSC et sur la manière dont des marges de sûreté suffisantes peuvent être maintenues aussi longtemps que possible. En outre, seuls quelques éléments d’une centrale nucléaire sont réellement déterminants pour la durée de vie, à savoir les grands SSC passifs qu’il est pratiquement, techniquement ou économiquement impossible de remplacer. Les programmes d’OP, d’AM, d’ASP et de PLiM visant à contrer ou à atténuer la dégradation due au vieillissement (AD) (et à maintenir des marges de sécurité suffisantes) se concentrent naturellement sur ces SSC, car plus ils sont maintenus en état de fonctionnement, plus la durée de vie opérationnelle réelle de la centrale nucléaire est longue. Il en résulte une meilleure chance de protéger l’investissement global de la centrale. En outre, les SSC qui peuvent être remplacés de manière routinière bénéficient également des PO, de la surveillance ou de la maintenance standard, car ils peuvent être maintenus en service au-delà de leur durée de vie nominale si leur état réel est connu. Les coûts de remplacement peuvent alors être reportés à un moment ultérieur, voire totalement évités. Cependant, la sécurité doit avoir la priorité sur les aspects économiques ; tout événement lié à la sécurité peut potentiellement devenir plus coûteux que les économies à court terme réalisées en retardant les réparations ou les remplacements des SSC. Les efforts visant à minimiser les DA ont un coût, mais la minimisation des contributeurs qui entraînent un remplacement prématuré ou inutile des SSC représente des coûts évités.
Le coût total de la construction et de l’exploitation d’une centrale nucléaire dépend de nombreux facteurs complexes. La qualification de l’impact environnemental, l’emplacement du site, les routes d’accès, la construction de lignes électriques, l’acquisition de terrains, la construction, la mise en service, l’exploitation, le traitement des déchets radioactifs, l’élimination des déchets radioactifs et, finalement, le déclassement, n’en sont que quelques-uns. Les autres facteurs de coût, outre la nécessité de disposer d’un personnel qualifié suffisant pour tous les aspects de l’exploitation, comprennent le carburant, les droits de licence, les dépenses supplémentaires liées aux réparations et aux remplacements des SSC, ainsi que les coûts d’exploitation inhérents à la centrale (par exemple, le coût des programmes OP, ASP, AM et PLiM). Des coûts inhabituels ou imprévus peuvent survenir à tout moment au cours de l’exploitation, comme le remplacement des générateurs de vapeur (GV) et des enveloppes du cœur, voire le recuit de la cuve sous pression du réacteur (VPR). Ces éléments ne sont pas seulement coûteux en soi, mais leur remplacement entraînera également des arrêts prolongés et donc une faible disponibilité de la centrale et, par conséquent, des pertes de ventes d’électricité. Par exemple, le remplacement des GV causé par des problèmes d’intégrité des tubes en alliage 600 est devenu une nécessité pour de nombreux anciens réacteurs à eau pressurisée (REP). Il s’agit d’une tâche importante qui coûte environ 150 millions de dollars US, en fonction de la conception de la centrale nucléaire concernée. Ces coûts d’investissement majeurs ne sont susceptibles d’être récupérés que si la centrale concernée continue à fonctionner et entre dans la phase d’exploitation à long terme de sa vie. Le renouvellement des licences (LR) (pratique américaine) ou la poursuite de l’exploitation avec un réexamen périodique de la sûreté (PSR) tous les 10 ans (pratique européenne) signifie que ces investissements peuvent être amortis sur une période plus longue (20 ans). Le coût typique d’une procédure de RL aux États-Unis est d’environ 10 à 20 millions de dollars US. La valeur nette actuelle du RL, si toutes les centrales nucléaires en service aux États-Unis sont exploitées pendant 60 ans, est d’environ 25 milliards de dollars US. Le processus de RL aux États-Unis peut prendre jusqu’à 5 ans, mais l’approche du RL se simplifie au fur et à mesure que les bonnes pratiques et l’expérience sont mises en œuvre. Il est reconnu que le RL est un moyen relativement rentable de maintenir l’approvisionnement en énergie sûre et propre, et en avril 2009, l’organisme de réglementation américain (US-NRC) avait déjà ré-autorisé 52 centrales nucléaires (environ la moitié du parc américain), et à terme jusqu’à 85 (de 104) centrales nucléaires pourraient bénéficier du RL.